Les Humanités, Lettres et Philosophie découvrent la langue des signes
Deux formateurs de l’association Gabriel Deshayes EILAN (Brech)
Esther Dulong, sourde de naissance, et Loïc Jaquemin, interprète, proposent une formation en langue des signes française. Eïlan veut dire en breton, écouter, accompagner : en effet l’association favorise l’insertion sociale des personnes sourdes, malentendantes ou malvoyantes.
Historique de la langue des signes française
La langue des signes est une expression corporelle qui inclut le mime et qui pourrait venir de la Préhistoire.
L’Antiquité : La langue des signes existe depuis que les sourds ont pu se regrouper et former de petites communautés.Platon écrit dans le Cratyle : « Si nous n’avions point de voix ni de langue et que nous voulussions nous montrer les choses les uns aux autres, n’essaierions-nous pas, comme le font en effet les muets, de les indiquer avec les mains, la tête et le reste du corps ? »
L’Abbé de l’épée (1712-1789) est à l’origine de la première école pour les sourds-muets. Il la destine à des enfants pour la plupart issus de familles pauvres ou indigentes.
Il élabore pour ses élèves une pédagogie alors inédite, qui repose non sur l’articulation et la parole vocale mais sur la langue des signes utilisée par les sourds pour communiquer entre eux. Sa méthode bénéficie rapidement d’une consécration internationale.
Laurent Clerc (1785-1869), sourd, rejoint l’Institution nationale des Sourds-muets de Paris. Il devient répétiteur à l’âge de 22 ans. Le pasteur américain Thomas Hopkins Gallaudet lui demande de l’accompagner aux États-Unis pour y fonder la première école pour sourds à Hartford (l’American Asylum for the Education and Instruction of the Deaf and Dumb).
Ferdinand Berthier (1803-1886), devenu sourd à l’âge de 4 ans, entre à l’Institut des sourds-muets de Paris. Elève brillant, il commence une carrière d’enseignant qu’il terminera doyen des personnes sourdes.
Il se montre le mobilisateur de la culture sourde, ne cessant de revendiquer le droit pour les sourds de pouvoir utiliser la langue des signes en toutes circonstances (à l’école, au tribunal, etc.) afin d’accéder à l’égalité civile. Il fait également connaître les artistes et les poètes sourds de son époque et des précédentes.
Malheureusement, en 1880, Le congrès de Milan, organisé à l’initiative de défenseurs français et italiens de la méthode orale, interdit la langue des signes. Durant un siècle, on va alors privilégier une rééducation par la parole. Les conséquences pour les sourds sont importantes : les professeurs sourds ne sont plus requis, puisqu’ils sont considérés comme n’étant pas aptes à enseigner la parole, ils sont donc mis à la retraite ou licenciés.
A la fin du XXème siècle, la langue des signes est réintroduite et la loi du met officiellement fin à l’obligation de la méthode orale pour l’éducation des sourds en France.
Les sourds ont longtemps été mis au banc de la société : parce qu’ils étaient privés de parole, on les considérait comme dénués de raison.
Une langue à part entière
La grammaire se structure selon un ordre objet-sujet-verbe. L’action s’énonce à la fin de la « phrase ». Rien à voir avec l’ordre propre à la langue française orale : sujet-verbe-complément. D’autre part, la langue des signes ne se structure pas avec des mots mais selon l’ordre de la pensée, ce qui permet de dire plusieurs choses en même temps.