L’enseignement d’exploration des langues et cultures de l’Antiquité s’adresse à tous les élèves de seconde, quel que soit leur projet d’étude. Il leur permet de renforcer tous les apprentissages. Visite guidée…
Littérature
Sire, mon père est mort ; mes yeux ont vu son sang
Couler à gros bouillons de son généreux flanc ; (generosus : bien né, de noble race)
Pierre Corneille, Le Cid, acte II, scène 8, vers 659-660
La compréhension du vocabulaire classique et la connaissance de la mythologie gréco-romaine facilitent l’accès aux grands textes poétiques de la Pléiade ou des tragédies du XVII° siècle. Une petite maîtrise du vocabulaire latin permet d’éviter bien des contresens : tout latiniste sait que le charme renvoie à un sortilège magique (carmen : parole magique), qu’être étonné c’est être frappé de stupeur (adtonare : frapper de la foudre) ; tout helléniste sait que la philosophie est dans son sens premier « recherche scientifique » : favoriser le second sens, « amour de la sagesse » ne nous met pas en condition de comprendre pourquoi les philosophes antiques parlent aussi souvent
- d’astronomie,
- de cosmologie,
- de botanique,
- de physique,
- de zoologie,
- voire de grammaire
Ni pourquoi d’Alembert et d’autres « philosophes » français du XVIIIe siècle s’adonnaient autant aux sciences et à l’Encyclopédie !
Par ailleurs, la fréquentation familière à travers les textes anciens de figures héroïques comme celles de Médée, Orphée, Phèdre, Œdipe, Antigone, Ulysse, Andromaque… ne peut que faciliter l’entrée dans les œuvres majeures de notre patrimoine qui en proposent des réécritures.
“Le philosophe ne fait que convaincre, l’orateur, outre qu’il convainc, persuade.” Fénelon, Dialogues sur l’éloquence.
La rhétorique grecque née au cinquième siècle avant notre ère, tout comme sa fille, la rhétorique latine, toutes deux alors disciplines fondamentales dans le cycle des études, initient l’apprenti orateur à l’art de capter l’attention et de susciter la bienveillance de l’auditoire : cet enseignement est bel et bien conçu comme une aide à l’expression écrite et orale. Il s’agit de sensibiliser tout locuteur à la distribution du discours en parties, à l’agencement des mots à l’intérieur de la phrase, et aux propriétés persuasives du discours. En seconde et en première, les élèves travaillent en classe de français sur un objet d’étude consacré aux genres et formes de l’argumentation : Démosthène et Cicéron apporteront un soutien précieux en matière d’éloquence…
Histoire
Rome et Athènes : un choc de civilisations ?
Que dire du face à face entre Rome et la Grèce ? Sur une période de deux ou trois siècles, Rome a conquis le monde grec. Or, si Rome gagne les batailles, la Grèce gagne la guerre. Le poète romain Horace caractérise la relation entre la Grèce et Rome en un vers, « La Grèce, conquise, a conquis son farouche vainqueur et a porté les arts au Latium sauvage », Épîtres, A Augustus II, vers 156. Étudier les relations interculturelles dans l’espace gréco-romain c’est réfléchir sur l’interculturalité, le métissage, l’identité, l’altérité, l’acculturation et, dans notre cas, sur ce que Florence Dupont appelle l’« altérité incluse » : Rome était à la fois romaine et grecque, et romaine parce que grecque. La Grèce ne fut jamais plus grecque que sous l’Empire romain même si cette « grécité » était l’invention des vainqueurs…
Sciences humaines et sociales
Barbare ou civilisé ? Une affaire de langue.
Latin et Grec sont non seulement des langues mais des vecteurs de culture. Lire les textes anciens nous permet d’être confrontés à ces étrangers du temps passé que sont les Grecs et les Romains – et avec eux tous ces « barbares » qui les effrayaient et les fascinaient. Grecs, Romains et Barbares, telle est, présentée de façon lapidaire, la composition ethnique traditionnelle du monde antique. Le terme « barbare » désigne, par imitation, des hommes dont le langage inarticulé ressemble au babil de la gent ailée. Forts de leurs traditions et convaincus de leur supériorité culturelle, les Grecs ont appliqué indistinctement le terme — et ses dérivés — à toute langue étrangère. Bien vite, les populations ne parlant pas la langue du pays seront regroupées sous cette étiquette générique : chez les Égyptiens, celles qui ne parlent pas l’égyptien, chez les Grecs, celles qui ne s’expriment pas en grec et, pour finir, chez les Romains, celles qui ignorent le latin. Cette vision du monde doit être interrogée pour poser la question de l’ouverture vers les cultures étrangères. Peut-on envisager une vision cosmopolite du monde qui ignore la notion de « barbare » ?
Langues vivantes
Des langues anciennes écrites pour mieux apprendre les langues vivantes
Les langues parlées dans le monde fonctionnent par familles dans lesquelles on retrouve des structures grammaticales et syntaxiques communes et un fonds de vocabulaire commun. Le latin et le grec sont au fondement de la famille des langues dites « indo-européennes », dont font partie, par exemple, la majorité des langues parlées de nos jours en Europe. Parce qu’elles sont les ancêtres de nombreuses langues vivantes, les langues anciennes facilitent beaucoup leur apprentissage. On retrouve de nombreuses racines latines en italien, en allemand, en espagnol, en anglais, etc. Le principe des langues à déclinaison, inconnu en français et en anglais, mais indispensable pour beaucoup d’autres, pose souvent de gros problèmes aux élèves, mais beaucoup moins s’ils ont étudié le latin et/ou le grec. L’alphabet grec n’ayant pratiquement pas bougé depuis l’Antiquité, connaître le grec ancien permet de lire le grec moderne et donne quelques bases pour cette langue. L’alphabet cyrillique (utilisé par le russe et d’autres langues slaves) utilise en partie des lettres grecques…
Philosophie
Penser avec les philosophes anciens : connais-toi toi-même
Les Grecs ont inventé le mot philosophia et cette tradition de la philosophia grecque s’est transmise jusqu’à nos jours. Il existe cependant une différence profonde entre la représentation que les Anciens se faisaient de la philosophia et la représentation que l’on s’en fait de nos jours : les écoles philosophiques de l’Antiquité correspondent avant tout au choix d’une certaine façon de vivre qui exige de l’individu un changement total de vie. Étudier avec Socrate que savoir c’est avant tout savoir vivre , connaître grâce à Platon les exercices spirituels permettant de changer radicalement de point de vue et d’embrasser la totalité de la réalité dans une vision universelle, s’efforcer sous la conduite d’ Epicure de délivrer la chair de sa souffrance et d’ainsi lui permettre d’atteindre le pur plaisir d’exister, faire avec les Stoïciens la part de ce qui ne dépend pas de nous (les causes extérieures, le Destin) et ce qui dépend de nous (la volonté de faire le bien et d’agir conformément à la raison) pour trouver la liberté, l’indépendance, l’invulnérabilité, la cohérence avec soi-même, telles sont les leçons qui permettront à tout un chacun de se nourrir de ces options existentielles.
Logique
Traduire, c’est mener une enquête !
« On aurait tort de croire qu’il n’y a pas de lien entre une version latine et Agatha Christie. C’était au contraire une assez bonne préparation, en ce que, d’abord, j’y avais pris goût aux jeux de la logique. Et puis, on ne s’y trompe pas : du texte latin au roman policier, les mêmes mécanismes mentaux sont en cause, qu’il faut conduire par des voies fort semblables. Pour un lycéen de langue française qui aborde le latin, ce qui constitue la nouveauté et la caractéristique essentielle, c’est que non seulement les verbes, mais aussi les substantifs, prennent différentes formes au gré de la fonction qu’ils assument dans la phrase. De là découlent de remarquables similitudes. Les désinences dans le texte latin jouent un rôle identique à celui des indices dans un problème policier. Une fois ceux-ci relevés, puis correctement interprétés, tout s’enchaîne, devient évident. Il en va dans le cadre de la sentence latine comme dans celui de l’enquête criminelle. En revanche, pour un indice passé inaperçu, pour une désinence mal comprise, il suffira qu’un seul point reste obscur pour faire obstacle à tout, et que rien n’aboutisse.
Brûler l’étape n’est pas permis. Défense de deviner. Ni dans les déductions d’Hercule Poirot, ni dans une version latine il n’y a de place pour l’intuition, qui serait une dangereuse tricherie. Reste pour le potache, ou pour le petit policier belge, à tourner et retourner entre les doigts, l’un après l’autre, tous les pions disponibles. Reste à piétiner le temps qu’il faudra. Reste à chercher, chercher et continuer à chercher. »
Georges Arnaud, préface du Meurtre de Roger Ackroyd pour l’édition en Livre de Poche, 1961
Sciences
Fréquenter de grands scientifiques et découvrir des inventions de génie.
Grâce aux langues anciennes, il est possible de s’initier à l’histoire des sciences à travers de grands savants, tels Pythagore, Thalès et Euclide, Hippocrate et Galien, Archimède et Vitruve, Pline l’Ancien, Epicure.
Les connaissances scientifiques des Grecs et de leurs héritiers romains concernent essentiellement l’astronomie, l’arithmétique et la géométrie, la géographie, la médecine avec des notions d’anatomie et de physiologie, la zoologie, la botanique, la minéralogie, quelques notions de physique. Par ailleurs, le vocabulaire scientifique et technique des langues modernes s’accroît sans cesse et continue à se former en grande majorité à partir du grec ancien et du latin. Dans certains cas, surtout en zoologie, botanique et minéralogie, des noms propres mythologiques ont été adoptés comme étymons. Ce bagage culturel est fort apprécié par tous ceux qui envisagent des études scientifiques.
Art
Beau comme l’antique !
Une grande partie de la culture artistique que nous connaissons, notamment la sculpture et l’architecture, est inspirée de l’Antiquité grecque. Les Romains furent, eux, de grands bâtisseurs, et on leur doit les ouvrages qui peuplent encore nos villes aujourd’hui : aqueducs, ponts, immeubles collectifs, circuits d’adduction d’eau, chauffages par le sol, piscines, théâtres, voies de circulation … L’antiquité n’a jamais cessé d’inspirer les artistes et l’art contemporain s’en nourrit aussi allègrement. Comment ne pas reconnaître en effet l’influence de l’arc romain de Titus en observant l’arc de Triomphe de l’Etoile ?ou l’influence des Propylées de l’Acropole d’Athènes en contemplant la porte de Brandebourg ? ou bien encore la Vénus de Milo en regardant la Vénus aux tiroirs de Dali ? A Montpellier, le quartier Antigone ressuscite une antiquité gréco-romaine fantasmée : les bâtiments de Ricardo Bofill multiplient les rappels à l’ornementation des bâtiments antiques, autour d’une promenade jonchée de copies de statues de provenances et d’époques distinctes. Au fil des siècles, les artistes ont ainsi inséré des éléments antiques comme autant de citations qui viennent en quelque sorte cautionner leurs œuvres. Bref, l’antique est parmi nous !
Cet enseignement s’enrichit de visites et voyages pédagogiques annuels qui permettent de découvrir in situ les richesses du patrimoine antique.